Après un passage à la télévision
de la sœur de Saber Meraihi, l’activiste Azyz Ammami a publié sur sa page
facebook le dossier juridique de l’inculpé. Les révélations du dossier laissent
des questions troublantes quant à l’objectivité de l’interrogatoire et de
l’investigation faite par le juge de l'instruction qui a suivi l’affaire.
Les évènements de l’affaire se
sont déroulés lors de la révolution. Dans une période où le peuple tunisien a
assuré la sécurité des quartiers et des biens
publics. Tout le monde se rappelle de cette période, où tous les hommes des
quartiers ont veillé des nuits entières pour protéger le pays des milices qui
ont essayé, d’après des sources officielles, de semer la terreur et d’instaurer
l’anarchie en Tunisie. Ainsi, et avec la coopération de l’armée tunisienne, les
comités de protection des quartiers, étaient autorisés officieusement à contrôler
toutes les voitures qui circulent pendant la nuit. Vérification des papiers et
contrôle des voitures ont aidé à capturer plusieurs groupes armés. Certaines
vidéos sur facebook et autres reportages télévisés ont documenté cette période
où le peuple était le héros de la révolution tunisienne.
Revenant à l’affaire de Saber
Meraihi. Il est, justement, accusé d’avoir agressé un policier et de voler et brûler sa
voiture lors d’une opération de contrôle dirigée par un comité de protection
de l’un des quartiers d’Ibn Sina. Le
policier a été agressé le 16 Janvier 2011 mais a décidé de porter plainte,
plusieurs mois après, soit en avril 2011. De là commence un flou qui marque
toutes les étapes de l’affaire.
Pour faire court et pour expliquer
l’affaire, rapidement, aux lecteurs, nous allons relater simplement les
remarques, les plus importantes, d’Ibrahim Boudirbala, l’avocat de Saber Meraihi,
transcrites en arabe dans la demande (que vous trouverez en fin de l’article) de libération et de cassation rédigée à
l’intention de la cours de cassation à Tunis:
- - Le plaignant a porté
plainte en se basant sur une vidéo, publiée sur facebook, qui montre, sans
précision, des jeunes d’un comité de protection d’un quartier populaire en
train d’insulter deux policiers capturés par l’armée. La vidéo n’a aucune
relation avec les faits du 16 janvier. De ce fait, il est impossible d’établir
un lien entre cette affaire et la vidéo présentée comme preuve qui condamne
Saber Meraihi.
-
- Le juge d’instruction n’a
pas inclus la défense de l’accusé dans son rapport ce qui fausse les
conclusions du rapport et le jugement en lui-même.
- - Le jugement est basé
exclusivement sur les témoignages du plaignant et ses accusations.
- - Plusieurs passages du
témoignage du plaignant sont contradictoires et manquent de pertinence
(exemple : il prétend être agressé par des couteaux alors que son
certificat médical lui donne seulement 10 et 20 jours de repos. Il précise
qu’il était agressé par plusieurs personnes et qu’il ne se rappel pas des
visages puis prétend se rappeler du visage de Saber uniquement)
Reste une
précision importante à signaler : Saber Meraihi n’habite pas le même quartier
où le plaignant a été agressé.
D’un autre
côté, plusieurs habitants du quartier de Saber ont signé une pétition attestant
la bonne conduite de Saber surtout durant la période où il était responsable du
comité de la protection de son quartier. Les habitants témoignent aussi, dans ce même document, que Saber n’était pas présent sur les lieux où se sont déroulées les
agressions contre le policier plaignant dans cette affaire.
Ce que
plusieurs tunisiens ignorent, malheureusement, est que des centaines de jeunes
sont dans le même cas de Saber Meraihi. Après avoir participé aux évènements de la
révolution, ces jeunes (que nous avons remercié vaguement pour leur courage) se
trouvent en prison parce qu’ils ont brûlé un poste de police ou parce qu’ils ont
lancé des pierres dans une manifestation ou parce que les policiers du quartier
veulent simplement se venger. Il est facile de punir ceux qui veulent faire
tomber le système. Il est facile de réinstaurer la peur et la soumission d’un
peuple parce que sans justice, et sans
médias indépendants, il est impossible de réussir une révolution.